Avec l'entrée de Carlyle, c'est 1.1 milliard d'euros d'argent frais qui rentrent dans les caisses.
Les Echos avaient également signalé que "l'acquéreur se contentera de reprendre sa quote-part de la dette existante".
Cette petite précision indique plus d'1.3 milliard d'euros de dette devraient donc passer des cahiers de Cinven et Altice à ceux du géant américain.
Un premier constat : Cinven conserve une part de capital plus élevée que prévue puisque, au lieu de 35% initialement annoncés, ce sont donc 37,85% qui restent comptabilisés à son bilan.
Du côté d'Altice, la participation a baissé à 24,3% du nouvel ensemble. Ces cessions vont donc permettre donc à Carlyle de s'afficher à égalité avec Cinven, à 37,85%.
Pourquoi Carlyle n'est-il pas allé au-delà de cette limite ? Les raisons sont essentiellement financières : les clauses de la dette contractée par les actionnaires stipulent qu'en cas de changement de l'actionnaire majoritaire, les banques créditrices pourraient demander à renégocier. Etant donné l'ambiance morose des marchés financiers aujourd'hui, autant dire que le coût de ce refinancement exploserait : Cinven et Carlyle seront donc, et pour longtemps, à égalité.
Stratégiquement, Numericable sort très renforcé de cette transaction. Doté d'un actionnariat aux poches pleines, sa capacité d'endettement se voit renouvelée et lui donne les moyens d'investir afin d'accéder à une stature nationale majeure, voire européenne.
Les idées pour faire grandir Numericable ne manquent pas : Alice est clairement et officiellement dans la ligne de mire. La France est, en effet, loin d'être couverte en fibre à tous les emplacements rentables. Enfin, Completel, un opérateur que l'on retrouve derrière le réseau de Darty, fait aussi partie de l'achat et a besoin d'être recapitalisé pour augmenter sa zone d'influence et densifier le dégroupage.
Le scénario imaginé par les trois fonds d'investissement semble plausible. Tout d'abord, les trois capitaux-risqueurs se connaissent de longue date et possèdent des actifs géographiquement complémentaires. Lorsque France Telecom, après l'éclatement de la bulle technologique, avait vendu des actifs "non stratégiques" pour se désendetter, l'on trouvait notamment, parmi ceux-ci, Casema et France Telecom Cable.
Casema, acheté par un certain Carlyle et deux co-investisseurs pour 665 millions d'euros en 2003, a été revendu 2,1 milliards en 2006 à Warburg Pincus et un certain... Cinven. Après une diversification de son offre vers le triple play et de multiples fusions, dont notamment Multikabel et Essent Kabelcom, Casema est devenu l'acteur dominant du marché des Pays-Bas sous le nom de Dutch Cable.
Du côté de France Telecom Câble qui allait, après fusion avec de multiples acteurs, dont Noos, devenir Numericable, le prix d'achat de 60% de ses parts par Cinven et Altice avait été négocié pour 528 millions d'euros.
En Suède, Carlyle a acquis Com Hem, puis digéré UPC Sweden : 40% des foyers sont désormais couverts par ce câblo-opérateur. La stratégie européenne est claire, d'autant plus que l'un de leurs câblo-opérateurs américains, Insight Communications, est aujourd'hui à vendre...
Carlyle a également acquis de l'expérience sur le marché européen avec l'épisode Bredbandsbolaget AB : cet opérateur suédois a, lui, été revendu pour 6 milliards de couronnes suédoises à Telenor.
Enfin, Carlyle a récemment fait les titres des journaux de la City : n'eut été la crise financière actuelle, le rachat des activités câble de Virgin au Royaume-Uni, Virgin Media, était dans un état de négociation avancé et a bien failli se réaliser. On parlait de 8 milliards de dollars et également de faire disparaître la marque Virgin, au profit d'une autre.