Evaluer la couverture mobile d'Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free grâce à des mesures émanant à 100% du terrain : telle est l'ambition du nouveau baromètre de la couverture 4G publié aujourd'hui par nPerf. "Un complément indispensable aux chiffres théoriques annoncés par les opérateurs", écrit la société lyonnaise en préambule de cette étude qu'elle présente comme "inédite". "Une exclusivité mondiale", insiste son PDG Renaud Keradec, qui détaille pour Ariase les modalités de l'exercice.
Vous insistez sur le caractère inédit de ce nouvel observatoire de la couverture 4G ? Pouvez-vous expliquer pourquoi ?
Ce qui n'a jamais été fait, c'est d'aller déterminer la couverture géographique des réseaux de chaque opérateur dans un pays uniquement à partir de données crowdsourcing, c'est-à-dire de mesures de terrain réalisées par les utilisateurs de l'application nPerf. Il y a d'autres acteurs concurrents qui collectent ce type de données et ont produit des études différentes, mais aucun ne s'était encore penché sur la dimension surfacique du territoire.
Comment avez-vous procédé ?
Nous nous sommes inspirés de notre carte de couverture disponible pour le public. Nous l'avons adaptée grâce à un algorithme qui a découpé le territoire en parcelles de 425 m², et regroupé les données au sein de chacun d'entre eux pour effectuer les calculs. La grosse problématique étant que nous avions un peu plus de deux milliards de données à traiter. Cela nous a pris environ quatre mois.
La couverture 4G au crible de deux milliards de données
Ces deux milliards de données émanent de 140 000 utilisateurs. Comment s'assurer qu'ils sont représentatifs des comportements de la population ?
Il peut toujours y avoir un biais, mais il est largement maîtrisé si on le rapporte à la volumétrie totale : un panel de 140 000 utilisateurs, c'est déjà énorme. Surtout, l'écrasante majorité des mesures sont réalisées en arrière-plan, jamais au même endroit, et ne sont pas déclenchées par l'utilisateur. En réalité, même si les utilisateurs sont un peu "geeks", au quotidien, ils se déplacent comme tout le monde. On aura peut-être, en revanche, plus d'utilisateurs urbains, mais là aussi, c'est représentatif de la clientèle des opérateurs. Au final, on obtient une représentativité de la population française qui est plutôt très bonne.
Il y a deux composantes dans l'indice global : la couverture géographique et la couverture de la population en mobilité. Pouvez-vous préciser ces deux notions ?
La couverture géographique s'intéresse au nombre de parcelles du territoires couvertes en 4G. Par exemple, chez Orange, un taux de couverture de 78,70% signifie que 78,70% des parcelles visitées par les utilisateurs de l'application nPerf clients Orange étaient couvertes en 4G par cet opérateur. Le nombre de parcelles visitées par les abonnés des quatre opérateurs sont à peu près équivalents. Chez Free, ce chiffre est à 63,72%, ce qui est assez cohérent avec les chiffres publiés dernièrement par l'Arcep : 65% du territoire couvert en 4G par les 4 opérateurs, sachant que c'est Free qui dispose actuellement de la couverture la moins étendue.
Les besoins en 4G mis en évidence
Et pour la couverture de la population ?
C'est exactement le même principe que pour la couverture géographique, sauf que l'on va appliquer un poids aux parcelles en fonction du nombre d'utilisateurs nPerf qui y sont passés, tous opérateurs confondus. Concrètement, cela permet d'identifier les lieux et axes de circulation plus fréquentés, où la 4G sera donc naturellement plus sollicitée. A la différence de l'Arcep, qui pondère son indicateur de couverture en fonction du nombre d'habitants sur chaque commune, nous pondérons par parcelle, avec une granularité qui sera plus fine.
Et surtout, nous pouvons nous retrouver avec des parcelles qui pèsent très lourd dans des communes avec peu d'habitants, sur des grands axes de circulation, ou avec des parcs de loisirs par exemple. C'est pour cela que nous avons précisé en mobilité, car c'est là où se déplacent les gens, et non pas là où ils habitent. Si bien que la baromètre nPerf, en s'intéressant aux usages, va forcément mettre en lumière les zones où il y a le plus de besoins en 4G.
Sur la composante couverture de la population, on a l'impression que l'écart est moins important entre les opérateurs, Free et ses trois concurrents notamment.
C'est logique : Free va privilégier les villes, puisque c'est là qu'il touchera le plus de population, et va couvrir au passage les axes de circulation. Mais les quelques pourcents d'écart qui restent entre Free et Bouygues, par exemple, c'est très conséquent en réalité. En termes de couverture géographique, cela va demander beaucoup de temps à Free pour combler cet écart. Les 19% de différence sur la couverture géographique correspondent en fait à ces 4% d'écart sur la couverture de la population en mobilité : pour arriver à 98%, Free devra couvrir 20% du territoire en plus.
Le baromètre nPerf permet-il de distinguer les mesures de couverture 4G en intérieur et en extérieur ?
Non, mais l'outil ne déclenche pas de mesure quand la précision de la géolocalisation est supérieure à 20 m, or c'est un niveau de précision qu'il est très rare d'obtenir en intérieur. Un autre point à prendre en compte : l'application ne réalise des mesures que lorsque l'appareil se déplace, il faut bouger d'au moins 20 m pour déclencher une nouvelle mesure. Pour ces deux raisons, les mesures portent essentiellement sur la couverture en extérieur, mais cela inclut les déplacements motorisés (voiture, car, train).
Couverture 4G et qualité de service mobile : quel impact ?
nPerf réalise également un baromètre régulier de la qualité de service Internet mobile, peut-on établir des corrélations avec ce nouveau baromètre de couverture ?
On peut en trouver, par exemple, le taux de connexion 4G de notre baromètre de qualité de service, qui n'est pas calculé de la même façon mais fait ressortir la même hiérarchie entre les opérateurs en 4G et 4G+, ce qui tend à confirmer les résultats du baromètre de couverture.
Les corrélations entre couverture et performance restant quand même moins évidentes à trouver à l'heure actuelle, avec quatre opérateurs qui couvrent très bien en 4G, relativement bien en 4G+. Ce qui veut dire que la différence de performance ne va pas forcément se faire sur la couverture mais plutôt sur les réseaux : les fréquences utilisées, les façons de raccorder les antennes, par fibre ou par faisceau hertzien... Il y a deux ou trois ans, la couverture 4G n'était pas ce qu'elle est aujourd'hui, et cela aurait eu un impact plus visible sur les performances. Quand la 5G arrivera, s'il y a des écarts en termes de rapidité de déploiement des réseaux, il y aura probablement un impact sur la performance générale...
Pour retrouver les résultats de l'étude : Quel opérateur a la meilleure couverture 4G ? Réponse dans le nouveau baromètre nPerf