Tout comme l’an dernier à la même époque, ces Etats Généraux des Réseaux d’Initiative Publique se sont posés à Deauville, en plein cœur d’une communauté de communes qui fait figure de référence et de pionnière dans le domaine du déploiement de la fibre optique pour tous ses habitants (Cœur Côte-Fleurie dans le Calvados) avec ce RIP de 1ère génération.
Alors qu’à fin 2016, 50% de la population française était couverte en Très Haut Débit fixe, avec un plan France THD qui de l'avis de tous a enfin pris son envol, de nombreux freins restent hélas en place, comme l'a montré cette réunion. Un point d’étape pour comprendre les enjeux et les difficultés des territoires, des opérateurs télécoms et des acteurs du déploiement des infrastructures THD.
Si l’édition 2016 s’appelait ‘Peur sur les RIP’, la thématique de cette année était nettement plus optimiste, malgré des tensions palpables entre les OCEN (opérateurs de communication d’envergure nationale : Free, Orange, Bouygues Telecom et SFR) et le reste du secteur. Une réunion qui s’est finit sur un appel collaboratif aux participants afin d’établir une liste de 10 propositions à transmettre aux candidats à l’élection présidentielle, pour améliorer le numérique en France.
Un processus très similaire à ce qu’avait réalisé le 1er mars le Club Numérique 2017 avec sa charte, proposée aux candidats pour formaliser certains engagements des candidats à l’élection présidentielle sur les thématiques du numériques.
Des absences majeures sur l'événement des EGRIP
Avant toute chose, comme le faisait remarquer Sébastien Côte (monterritoirenumérique.com), l'organisateur de l'événement, on pouvait noter les absences remarquées de quelques acteurs majeurs. En premier lieu, celle des représentants du gouvernement, qui faisaient cruellement défaut, sur un sujet pourtant censé être essentiel.
Idem, pas de représentant de la Cour des Comptes suite à la publication d’un rapport très controversé.
En fait, depuis le départ d'Axelle Lemaire qui insufflait un véritable élan sur les sujets liés au numérique, et comme déjà constaté durant l'événement de la FIRIP début mars, on a vraiment l'impression que plus personne ne s'occupe du sujet au sein du gouvernement...
Philippe Augier, Maire de Deauville et Président de la communauté de communes Cœur Côte Fleurie n’a pas hésité lui non plus à se déclarer ’ affligé par le peu de présence des thèmes du numérique dans la campagne présidentielle’.
Heureusement, les acteurs institutionnels investis comme l'ARCEP (représenté par Guillaume Mellier, Directeur de la direction infrastructures et territoires) ou encore l'Agence du Numérique (Antoine Darodes, Directeur), étaient présents et sont intervenus afin d'apporter leurs connaissances pointues dans les discussions.
Autres absences qui semblent illustrer pour certaines le manque d'intérêt des FAI nationaux pour les territoires moins denses, personne de Free n'était là, et plus curieusement, personne non plus de Bouygues Telecom. Alors que ces deux opérateurs ont annoncés fin 2016 l'arrivée de leurs offres sur les RIPs, il aurait été pourtant légitime d'avoir sur ces Etats Généraux des RIP (EGRIP) des responsables de ce opérateurs, afin de confirmer cette volonté ou de donner des dates précises, pour ce qui reste pour l'instant de l'ordre de simples effets d'annonces.
Réallocation des opérateurs sur les zones AMII et offres pros
Deux sujets majeurs ont été abordés, parfois de façon très houleuse entre Orange, SFR, les autres opérateurs, la FIRIP et les représentants institutionnels (ARCEP et Agence du Numérique).
Le premier concernait les zones AMII, moyennement denses, sur lesquelles Orange a vivement contesté les chiffres du dernier Observatoire RIP 2017. Il est vrai les chiffres avancés de 2,3 millions de prises FTTH déployées sur 13 millions, étaient mis en parallèle avec d’autres sur les ZTD et RIP, pour lesquels on parlait de prises déployées ou signées.
Pour être plus précis, il faudrait donc ajouter sans aucun doute quelques millions de prises 'prévues', mais il n’en reste pas moins que la zone AMII reste en retard en termes de déploiements et de prévisions de prises...
De son côté, SFR a encore rappelé sa demande de voir la répartition des déploiements revus en sa faveur, pour s’approcher d’un 50/50 avec Orange, qui selon SFR permettrait de respecter les plannings de déploiement du plan France THD.
L’autre sujet fort concernait la partie pro, avec la situation de monopole d’Orange, et dans une moindre mesure de SFR, qui détiennent 90% du marché sur les zones plus denses, avec l’impossibilité pour les autres opérateurs présents sur les RIP (Adista, Alsatis, Nerim...) de pouvoir venir proposer leurs offres aussi sur les grandes agglomérations. Difficile pour ces opérateurs ciblant les entreprises de pouvoir toucher notamment les entreprises multi-sites, avec une demande d’ouverture d’offres de gros avec des réseaux fibres activés, afin de permettre à la concurrence d'exister.
Cœur Côte Fleurie : du FTTH pour tous par Tutor-Covage
A l’initiative du projet, dès 2006, de proposer la fibre optique à tous les habitants de Deauville et des communes avoisinantes, qu’ils soient résidents permanents ou saisonniers, on retrouve notamment le dynamisme de Philippe Augier, Président de la Communauté de Communes Cœur Côte Fleurie et Maire de Deauville. Avec Tutor à l'époque comme partenaire pour le déploiement de la fibre sur la zone concernée, devenu depuis Covage, ce sont en tout 33500 prises FTTH qui ont été déployées sur le réseau appelé Coeur Fibre.
Actuellement, sont présents plusieurs opérateurs (Ozone, K-Net, Comcable, La Fibre Coriolis avec Canal+ et Kiwi), avec l'arrivée toute récente de VITIS avec sa box LA FIBRE videofutur. Cependant, Pierre Augier espère bien que les opérateurs nationaux finiront un jour par arriver sur son réseau, afin de proposer leurs offres à tous ses administrés, un sujet qui était déjà une priorité durant le précédent EGRIP l'an dernier.
Comme le laissait entendre Philippe Augier, les opérateurs nationaux arriveront en courant sur les RIP lorsque le pourcentage de prises FTTH connectées sera significatif, avec des 'petits' opérateurs qui grignoteront des parts de marchés, et une proportion du parc d'abonnés xDSL qui deviendra critiquement faible pour la rentabilité de ces OCEN...
Pour finir sur la région Normandie et ses 3,3 millions d'habitants, comme le confirmait Laurent Marting, Conseiller régional de Normandie, avec ses 2900 communes, 66% du territoire qui est dévoué à l'agriculture et un habitat disséminé, les choix ont été disparates de la part des départements.
Chacun a pris des décisions différentes, avec par exemple l'Orne, territoire plus rural et peu dense (300 000 habitants), qui a plutôt opté pour un choix de la montée en débit des ses sous-répartiteurs (ADSL/VDSL2), alors que l'Eure, s'est plus axé vers la fibre optique, avec il y a encore peu 140 000 prises FTTH signées par Eure Numérique (et environ 30 000 foyers en montée en débit).
Désormais, avec un stratégie plus homogène, c'est bien la fibre optique qui est privilégiée par la région Normandie, avec un désir de mutualisation du marché pour attirer les opérateurs !