Avec plus de 4.4 millions de clients conquis en 9 mois, Free Mobile a réussi son lancement commercial même si la répartition entre l'offre à 2€ et le forfait "illimité" à 19.99€ reste la grande inconnue. Quoi qu'il en soit, ce sont autant de clients qui ont résilié leur forfait mobile et qui, au final, ont obligé les opérateurs concurrents à adapter leur gamme.
Dès le début de l'offensive de Xavier Niel, les concurrents ont contre-attaqué sur les prix et sur les services (hausse du "fair use" de l'Internet, ajout de destinations internationales...) pour limiter la casse. Conséquence directe de l'engouement pour Free Mobile, les marques Sosh (Orange), B&You (Bouygues Télécom) et la gamme Red de SFR ont décollé parallèlement en misant sur le modèle du low-cost et du sans engagement. Chacun disposerait actuellement de de plus de 600 000 clients.
Baisser les prix et attaquer les marges des concurrents
A la lecture de l’observatoire des marchés de l'ARCEP, on constate que l'arrivée de Free Mobile a contribué à la baisse de 10.9% de la facture moyenne de téléphonie mobile durant les deux premiers trimestres de l'année écoulée. Sur les forums et les réseaux sociaux, les plus gros consommateurs (notamment de data 3G) évoquent même des économies de plusieurs centaines d'euros en 2012.
Free Mobile a, par ailleurs, réussi à déstabiliser le modèle économique des opérateurs historiques en décloisonnant le prix de l'abonnement de celui du téléphone. Pourtant si la subvention des mobiles est attaquée par Free Mobile - une plainte pour "concurrence déloyale et crédit déguisé" cible contractuellement SFR - le nombre de clients forfaitaires des concurrents continue de progresser. Une partie des français préférerait donc encore la dilution du prix du mobile dans le forfait plutôt que la mise en place d'un crédit.
Le succès commercial de Free Mobile a provoqué une baisse des profits chez Orange, SFR et Bouygues Télécom. Ces derniers ont été contraints de baisser leurs tarifs, d'une part, et de multiplier les efforts (publicité, promotions, fidélisation) pour maintenir leurs parcs de clients d'autre part. En d'autres termes, Xavier Niel a attaqué la profitabilité de ses concurrents.
Avec un parc d'abonnés mobile équivalent désormais à son parc de clients Internet, Free doit prouver en 2013 qu'il est en mesure d'aller chercher de nouveaux clients sur d'autres segments du marché comme les offres "Data Only" ou bien les forfaits ciblant les professionnels.
Améliorer la qualité de service
Pour cela, Free Mobile devra faire face à 3 principaux défis. Le premier consistera à améliorer la qualité de service, notamment sur l'Internet mobile. comme l'ont montré une récente étude de l'ARCEP. L'UFC Que Choisir L'UFC-Que Choisir estime que "la qualité du réseau 3G de Free Mobile n'est toujours pas au rendez-vous" et entend le démontrer lors de la présentation d'une étude dans quelques jours.
Répondant aux journalistes d'Envoyé Spécial (France 2), Xavier Niel affirme qu'Orange limite la bande passante sur certaines antennes. D'autres estiment que Free Mobile briderait les débits pour faire des économies sur le contrat d'itinérance avec Orange. La situation pourrait néanmoins s'améliorer grâce à l'utilisation (depuis le 1er janvier 2013) de la bande de fréquences de 900Mhz en zone très dense (Paris, Marseille, Lyon, Nice, Toulouse, Strasbourg, Lille).
La question des débits chez Free Mobile n'est d'ailleurs pas sans rappeler les problèmes de débit sur Youtube et la polémique sur l'interconnexion qui oppose Free et Google depuis plusieurs mois désormais.
Déployer plus vite pour s'affranchir de l'itinérance Orange
Pour Free Mobile, le second défi - directement lié au premier - est l'accélération du déploiement de son propre réseau. Et il semblerait que l'opérateur soit plutôt en retard sur ses propres objectifs. Alors que Free Mobile tablait sur 2500 antennes déployées fin 2012, il n'en aurait effectivement que 1779 selon l'Agence nationale des fréquences (ANFR).
Bien que Free respecte ses obligations contractuelles de couverture, il a tout intérêt à implanter et activer ses antennes au plus vite pour réduire la facture d'itinérance avec Orange, et maîtriser son réseau de bout en bout. Rappelons que la location du réseau Orange à Free rapporterait près de 500 millions d'euros par an... Un pactole bien utile qui fait office de matelas pour encaisser l’arrivée de Free, et qui sert aussi de trampoline pour doper les investissements d'Orange dans la 4G et la fibre optique.
Le troisième défi auquel Free Mobile devra s'attaquer concerne les mouvements du marché. En 2013, nul doute que la concurrence cherchera à regagner des parts de marché en misant sur le très haut débit mobile notamment. Sosh et B&You proposent déjà la H+ (théoriquement deux fois plus rapide que la 3G+ de Free mobile). Quant à SFR, il a commencé la commercialisation de la 4G à Lyon et Montpellier et table sur une dizaine de métropoles couvertes d'ici la fin de l'année.
Parallèlement à la course aux débits, Free Mobile devra maintenir la pression sur des concurrents. Sous le choc début 2012, ils ont su réagir au second semestre et ont provoqué à leur tour une réaction de Free Mobile qui a boosté son forfait à 2€ en décembre dernier.
Un forfait intermédiaire avec par exemple les appels illimités et 1Go de data verra-t-i le jour ? Un adaptateur Femto améliorant la couverture 3G sera-t-il fourni à l'image de ce que fait SFR depuis 2009 et de ce qu'Orange propose depuis peu ?