La 5G pour sortir de la crise
Le Président de la République, en personne, siffle la fin de la récré. Que les choses soient claires : "Oui, la France va prendre le tournant de la 5G". Emmanuel Macron l'a clamé haut et fort, hier, à l'occasion d'un rassemblement avec une centaine d'entrepreneurs de la "French Tech" réunis dans la salle des fêtes de l'Élysée. C'est la preuve, s'il en fallait encore une, que les enchères pour l'attribution des fréquences 5G commenceront bien le 29 septembre, avant une commercialisation des premiers forfaits 5G à la fin de l'année.
"La France est le pays des Lumières, c'est le pays de l'innovation. On va tordre le cou à toutes les fausses idées", a insisté le chef de l'État. La 5G, "c'est le choix de l'innovation", promet-il. Et de poursuivre, non sans ironie, en se moquant des anti-5G et notamment de ceux qui demandent un moratoire : "J'entends beaucoup de voix qui s'élèvent pour nous expliquer qu'il faudrait relever la complexité des problèmes contemporains en revenant à la lampe à huile ! je ne crois pas que le modèle Amish (communauté américaine hostile à certaines technologies, NDR) permette de régler les défis de l'écologie contemporaine". Voilà qui est dit.
Le message est limpide, un brin provocateur, et rejoint la communication ministérielle depuis plusieurs semaines : le réseau mobile 5G doit participer à la relance économique du pays, fortement impacté par la crise sanitaire. "Ce serait un retour en arrière pour la France et moi je préfère la France en avant, conquérante, qui réussit économiquement, que la France fossilisée qui ne bouge pas […], cette France qui vous dit qu'il ne faut plus de sapin de Noël parce que ça fait un sapin mort dans la mairie", déclarait hier un peu plus tôt dans la journée Bruno Le Maire, le ministre de l'Économie et des Finances.
Quelques semaines auparavant, le message d'Agnès Pannier-Runacher, la secrétaire d'État auprès du ministre de l'Économie et des Finances, était le même : "Faisons attention à ne pas prendre du retard [sur la 5G] et à ne pas se retrouver dans la situation qu'on a déjà vécue plusieurs fois en France où on va être plus intelligents que tout le monde et à la fin on est plutôt en retard sur le reste de la compétition". "Très vigilante sur ce qu'il se passe à l'étranger", la secrétaire d'État appuyait son argumentaire en disant que la 5G "a été un élément assez important de la Chine pour lutter contre le Covid. J'observe également qu'un certain nombre de pays, que ce soit aux États-Unis, que ce soit en Asie, jusqu'en Nouvelle-Zélande, ont accéléré leur déploiement de la 5G parce qu'ils pensent que c'est un élément de réponse à la crise et notamment pour soutenir les entreprises et leur donner de la compétitivité additionnelle".
La 5G dans le plan France Relance
Dans le plan de relance concocté par le gouvernement, qui doit permettre à la France de "reprendre son destin économique en main", l'État compte sur des "projets de développement des technologies critiques pour l'avenir comme la 5G ou la quantique". "L’appel à projets 5G sera lancé très prochainement, et des vagues suivantes d’appels à projets seront lancées en 2021 et 2022", mentionne en effet le plan France Relance, rendu public le 3 septembre dernier. Par exemple, la 5G pourrait favoriser "le développement des réseaux numériques des sites de production".
5G et santé : un premier rapport contredit les anti-5G
Ces derniers mois, de nombreuses voix se sont élevées pour remettre en cause l'utilité du nouveau réseau mobile, mais aussi pour dénoncer les effets de la 5G sur la santé et l'environnement et donc, demander un moratoire. Dernier épisode en date, dimanche dernier sous la forme d'une tribune parue dans le JDD. Une soixante d'élus (dont les maires de Bordeaux, Lyon, Marseille ou encore Yannick Jadot, Jean-Luc Mélenchon, Adrien Quatennens, François Ruffin, Eric Piolle, Julien Bayou, Alexis Corbière...) ont demandé un moratoire sur le déploiement de la 5G. Ils plaident pour "la tenue d'un débat démocratique décentralisé". Hier encore, François Ruffin, député de la France Insoumise a demandé un "référendum sur la 5G". Sur le terrain économique, Emmanuel leur apporté une réponse cinglante. En ce qui concerne la santé, c'est une étude réalisée à la demande du gouvernement qui apporte un premier élément de réponse.
Ce matin, en effet, un premier rapport est venu contredire les anti-5G, qui justifient leur demande d'application du principe de précaution par l'absence de données sur la 5G et ses effets potentiels sur la santé et l'environnement. Commandé à l'inspection générale des finances (IGF), l'inspection générale des affaires sociales (IGAS), le conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et le Conseil général de l'économie (CGE), ce rapport sur l'impact sanitaire de la 5G indique que, "à ce jour, les agences sanitaires qui se sont prononcées, tout en appelant à poursuivre les recherches, considèrent les effets sanitaires de la 5G, comme des autres radiofréquences déjà utilisées, non avérés en deçà des valeurs limites d'exposition". Parmi les agences des 22 pays qui ont effectué des relevés sur les niveaux d'exposition aux ondes électromagnétiques, l'ANFR (Agence Nationale des Radio Fréquences). Elle, comme les autres, ont obtenu des résultats 50 à 1.000 fois inférieurs aux seuils réglementaires.
"Il n’existe pas, selon le consensus des agences sanitaires nationales et internationales, d’effets néfastes avérés à court terme, c’est-à-dire d’effets thermiques délétères sur les tissus[…]. Les éventuels effets de long terme, cancérogènes ou non, difficiles à mettre en évidence, sont à ce stade, pour l’essentiel, non avérés selon les mêmes agences nationales et internationale", assure le rapport qui conclut en synthèse : "Les éléments disponibles à ce jour permettent d’estimer que l’introduction de la 5G en bande 3,5 GHz avec antennes actives ne générera pas de rupture en matière d’exposition". Voilà qui semble rassurant.
Seulement, dans les années à venir, la 5G sera aussi déployée dans la bande des 26 GHz, celles des ondes millimétriques. Or, précise encore le rapport, "le recours ultérieur à la bande autour de 26 GHz amènera des effets nouveaux restant à documenter". C'est pourquoi le rapport indique qu'il faut "conforter les moyens d’évaluation et de recherche de l’ANSES sur les effets sanitaires des ondes électromagnétiques, notamment sur les bandes de fréquence autour des 26 GHz". Pour rappel, les conclusions de l'ANSES sont attendues au printemps 2021.