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[Mis à jour le 11 février 2021] TV, tablette, smartphone, jeux vidéo... Les écrans sont partout dans le quotidien des enfants. Et sont imposés à eux un peu plus encore à l'occasion des périodes de confinement de 2020. Indispensables pour l'école à la maison notamment, mais aussi parfois omniprésents pour les divertissements confinés, télé, vidéos et streaming ont-ils intoxiqué un peu plus nos enfants ?
Pas forcément : la période a permis de nuancer certaines critiques, en ne mettant pas tous les temps d'écran dans le même panier. Il peut y avoir un intérêt à limiter le temps passé devant la télé ou autres smartphones et tablettes. Mais c'est finalement moins en raison de leur nocivité supposée que pour ne pas sacrifier d’autres activités essentielles, et préserver des moments importants dans la journée de l’enfant.
Reste qu'il est essentiel de savoir à partir de quel âge autoriser les écrans pour les enfants, afin de respecter le rythme de leur développement et de leurs apprentissages. Sans oublier le rôle d’accompagnement dévolu aux adultes, qui doivent aussi savoir montrer l’exemple...
Avant 3 ans : pas de télé, très peu de tablette
Pour les bébés et les très jeunes enfants, la règle est plutôt simple. Notamment sur la TV : la « la télévision n’est pas adaptée aux enfants de moins de 3 ans », tranche le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). Cette position reflète celle de nombreuses études réalisées sur le sujet, mettant en évidence l’impact de cette activité passive avec l’apparition, à court ou long terme, de certains troubles physiologiques ou psychologiques (obésité, troubles du comportement, difficulté dans les interactions sociales...).
Si elle sollicite une attitude plus active chez le jeune enfant, la tablette n’est pas non plus recommandée avant 3 ans. A la limite, pour une activité ludique de quelques minutes, à partager avec papa ou maman. A cet âge, « les jeux traditionnels et les livres sont à privilégier », souligne par exemple l’Association française de pédiatrie ambulatoire, pour permettre à l’enfant d’« interagir avec son environnement » et de « construire ses repères spatiaux et temporels ».
Quel écran à quel âge ? La règle du 3-6-9-12
Des recommandations que l’on retrouve dans la règle dite du « 3-6-9-12 » élaborée par le psychologue Serge Tisseron. Ce dernier promeut une approche progressive de la tablette, la télé, les jeux vidéo ou Internet en fonction de l’âge, et l’adoption de règles d’utilisation au quotidien.
L’idée étant non seulement de protéger l’enfant, mais aussi de le guider vers l’auto-régulation face aux écrans. Point de diabolisation ici, plutôt une sensibilisation des adultes au rôle crucial qu'ils ont à jouer dans cet environnement numérique qui n'a plus grand chose à voir avec celui dans lequel ils ont eux même grandi. D’où l’accent mis sur l’accompagnement par les parents, et le dialogue sur les activités et contenus rencontrés.
Contre les excès d’écrans : la règle des 4 PAS
Autre approche centrée sur les usages au sein du foyer, où l’on retrouve certains éléments évoqués ci-dessus : la règle des « 4 PAS ».
- Pas d’écrans le matin
- Pas d’écrans durant les repas
- Pas d’écrans avant de s’endormir
- Pas d’écrans dans la chambre de l’enfant
Mises au point par la psychologue Sabine Duflo, ces recommandations sur l'exposition aux écrans ne contiennent pas les dimensions d’accompagnement et de formation du 3-6-9-12. En revanche, elles se veulent plus pédagogues, en prenant soin d'expliquer les risques liés à certains types d’utilisation.
Combien de temps devant la télé ou la tablette ?
Il n’existe pas de recommandation précise concernant le temps passé devant les écrans et la durée d’utilisation idéale des tablettes, des smartphones ou de la télé. Les spécialistes les plus radicaux prônent le zéro écran. Certains experts suggèrent en outre l'existence d'un lien entre surexposition aux écrans et développement des troubles du spectre autistique, analyse néanmoins loin de faire l'unanimité.
Les recommandations 3-6-9-12 ou 4 PAS tendent naturellement à limiter le temps que l’enfant consacrera à ce type d’activité. Leurs auteurs conseillent ainsi une fréquence et une durée d’exposition aux écrans d’autant plus courte et occasionnelle que l’enfant sera jeune, et ses capacités de concentration limitées. Mais c'est moins pour ce qu'il fera devant son écran que de ce qu'il ne fera pas, précisément, pendant qu'il les regardera.
Car tout dépend en définitive de ce que l'on y fait, avec qui et comment... Et le premier confinement l'a bien montré au printemps. Si nos enfants on passé en moyenne 7 heures par jour devant télé, smartphone, tablette ou ordinateur durant cette période inédite, ce fut notamment à des fins éducatives. Ou encore pour rester en contact avec la famille ou les amis via Whatsapp et consorts. Même si, bien sûr les écrans ont aussi été utilisés à des fins récréatives, télé et jeux vidéo en tête. Interrogée récemment par Le Monde, la psychologue Vanessa Lalo appelle en définitive à ne pas se focaliser sur le temps d'écran :
"Le temps d’écran ne sera jamais une bonne valeur pour jauger nos pratiques numériques. (...) Une personne peut tout à fait passer quatorze heures par jour à regarder des vidéos de pandas qui pètent, une autre passera quatorze heures à lire des pages Wikipédia ou à regarder des vidéos pédagogiques sur YouTube… Ils passeront le même temps mais leurs pratiques sont différentes."
On peut toutefois retenir que tablette, télé ou jeux vidéo ne doivent pas monopoliser les temps de loisirs. L’alternance des activités est indispensable, afin de permettre aux enfants de développer l’ensemble des apprentissages qu’appellent leur âge. Ou encore profiter des bienfaits d'un petit tour dehors...
Le rôle des adultes : accompagnement... et exemple
Les experts insistent sur un autre point : éviter de laisser l’enfant seul face aux écrans. En tout cas pas seul face à ce à quoi il a pu être exposé : quitte à en discuter après coup. Il est en effet important de pouvoir discuter avec l’enfant de ce qu'il voit à l’écran : l’adulte pourra ainsi l’aider à interpréter les enjeux d’une activité, ou à prendre du recul face à ce qu’il voit. En particulier chez les plus jeunes, pour qui la frontière entre fiction et réalité est un concept parfois difficile à saisir.
L'idéal étant que ces moments soient partagés. Et l'on en revient encore au premier confinement, qui a vu nombre de familles se retrouver devant la télé, pour regarder ensemble les fameux "films du patrimoine", par exemple. Se mettre d'accord sur un programme, le regarder en famille : autant de moments de convivialité à l'ancienne, qui ont, en plus, permis d'"augmenter le capital culturel des enfants", témoignent certains parents interrogés dans le cadre de l'étude citée plus haut. Comme quoi, peu importe le support, pourvu qu'il rassemble...
Vrai pour les enfants, vrai aussi pour les parents, qui ont beau jeu de serrer la vis à leur progéniture, quand eux-mêmes consultent sans cesse leur petit écran noir... Il nous incombe ainsi de modérer notre propre usage des écrans en présence des enfants, en particulier de notre indispensable smartphone. Pour ne pas réduire à peau de chagrin les moments de discussion et de partage au sein de journées particulièrement remplies. Et puis parce que, pour eux, nous restons les premiers modèles. À mesure que l’enfant grandit, il risque ainsi d'être de plus en plus difficile de justifier des règles d'utilisation des écrans si nous-mêmes restons en permanence scotchés à nos smartphones. Prêts pour décrocher en famille ?