250 millions d’euros : c’est ce qu’a rapporté en 2017 le marché de la vidéo à la demande par abonnement (SVOD, ou VàDA en bon français), selon le bilan 2017 publié vendredi dernier par le Centre national de la cinématographie (CNC). Soit près du double de l’année précédente (131 millions d’euros), et, pour la première fois, plus de la moitié du marché total de la VOD. Un succès qu’explique l’afflux de souscriptions enregistré notamment par Netflix. D’autres acteurs ont également contribué à cette croissance, même si leur apport est plus délicat à quantifier : Amazon avec son programme Prime, ainsi qu’Altice-SFR avec son bouquet SFR Play.
Netflix domine, SFR Play et Amazon Prime progressent
Le service américain comptait ainsi quelque 2 millions d’abonnés au 31 décembre 2017. Un chiffre également revendiqué par SFR Play, mais qui inclut ici des abonnés n’ayant pas spécifiquement souscrit à la plateforme vidéo de l’opérateur. Le nombre de clients d’Amazon Prime est quant à lui estimé à 1,4 million, sans qu’on sache, là non plus, quelle part de ces abonnés utilisent le service de SVOD du géant du e-commerce. Quant à CanalPlay, on ne sait plus trop où elle se situe par rapport à ces acteurs : les derniers chiffres, datant de septembre 2016, faisaient état de 600 000 abonnés.
On peut raisonnablement penser que cette base s’est érodée depuis. C’est en tout cas ce que suggère le baromètre réalisé par le CNC auprès des internautes déclarant avoir payé pour de la VOD. Cette enquête fait ainsi état d’un tassement de la popularité de CanalPlay, avec qui SFR Play fait jeu égal sur les 9 premiers mois de 2017. Derrière, Amazon décolle et FilmoTV résiste. Loin devant, Netflix paraît intouchable : doit-on s’attendre à voir la firme de Los Gatos dévorer le paysage audiovisuel français dans les prochaines années ?
La télé à la française résiste
Le CNC reste prudent face à cette perspective. D’abord, observe-t-il, si le modèle de la vidéo à la demande par abonnement explose, il reste encore un petit poucet face à la TV « à l’ancienne ». En témoignent les 3,3 milliards d’euros dépensés par les ménages français (en 2016), face auxquels les 250 millions d’euros de la SVOD restent encore modestes.
Ensuite, contrairement aux Etats-Unis, où les abonnements à la TV par câble, souvent onéreux, fondent comme neige au soleil face à Netflix, Amazon, Hulu and co, les téléspectateurs français bénéficient d’une offre gratuite conséquente, avec notamment les 27 chaînes de la TNT et les replays, ainsi que les bouquets inclus dans les offre triple-play des opérateurs, rappelle le CNC.
L'enjeu de la diversité
D’ici à ce que les ogres américains engloutissent l’offre audiovisuelle française, il reste encore de la marge, croit-on comprendre à la lecture de ce rapport. Les firmes US continueront probablement à dominer le marché, mais les acteurs tricolores n’entendent pas se laisser faire : le CNC fonde ainsi quelques espoirs sur un éventuel renforcement de l’offre CanalPlay ainsi que sur les ambitions de l’audiovisuel public dans la SVOD.
Un projet qui a, du reste, été mis en pause récemment au profit d’une réflexion plus large sur un Netflix ou un Hulu « à la française », associant aussi les chaînes privées, signe que la perspective d’une domination des plates-formes américaines est prise au sérieux. L' enjeu est évidemment économique, mais pas seulement : il s'agit aussi de préserver la diversité de l’offre et la création, comme en témoigne la part de production française, européenne ou non-américaine dans les catalogues respectifs des différents services de SVOD (voir ci-dessous). Reste à savoir si tout ce petit monde parviendra à s'entendre, et à se mettre rapidement en ordre de bataille.