C'est la fin des zones blanches mobiles ! C'est un peu le message relayé par de nombreux médias grand public, mais derrière cette belle annonce d'un accord pour accélérer le déploiement de la couverture mobile des territoires, demeurent de nombreuses questions.
Le Président de l'Arcep rappelait qu'en matière de couverture mobile 4G, avec une 24ème place en Europe, la France était en mauvaise posture. Ce ' Newdeal ' instauré par cet accord, après 6 mois de tractations intenses, prouve surtout un changement de paradigme. Avec un Gouvernement volontariste, qui impose aux industriels le rythme des déploiements, profitant de la renégociation d'utilisation de licences mobiles pour accélérer l'aménagement des réseaux numériques mobiles sur les territoires.
Cela passera par des obligations contraignantes et des plannings précis (?), établis par les collectivités territoriales et non plus par les industriels. Avec surtout des sanctions financières. S'il faudra attendre quelques mois pour avoir les modalités complètes, il serait question de pénalités jusqu'à 3% du CA, voire tout simplement d'une rupture du contrat d'utilisation des licences. Une épée de Damoclès qui semble avoir fait mouche.
5 000 zones par opérateur... avec un planning au-delà de 2022
Dans le document fourni par l'Arcep, il est bien question de 5 000 zones par opérateur télécoms, donc 20 000 en tout, avec la mutualisation d'un maximum de sites.
Soit, en théorie :
- 2 000 zones sur des communes 'habitées', mais où aucun opérateur ne dispose aujourd’hui d'une couverture correcte. Avec dans ce cas des pylônes à construire mutualisés entre les 4 opérateurs
- 3 000 zones sur d'autres lieux pour améliorer la couverture actuelle, sur des territoires et communes où aucun opérateur n’est déjà présent ou celles où seulement certains opérateurs sont actifs. Avec selon les cas, de la mutualisation... ou pas !
Sur le timing des déploiements, il est question d'un échéancier par opérateur de 600 zones en 2018, 700 en 2019, 800 en 2020/2021/2022 et 600 par an ensuite. Donc, dans l'état actuel, on parle de 3 700 zones d'ici à fin 2022, pas de 5 000. Et encore, en restant optimiste sur les délais d'autorisation et de constructions des sites manquants...
3 à 4 milliards d'euros d'investissement... vraiment en plus ?
On nous annonce des investissements supplémentaires entre 3 et 4 milliards d'euros, en théorie en plus des investissements déjà prévus. Et c'est bien là que se pose quelques interrogations.
Sachant que sur la seule année dernière, les opérateurs ont activés pour la 4G (pas obligatoirement construits pour les sites) :
- SFR : 4 294 sites et 10 842 antennes
- Orange : 3 847 sites et 7 305 antennes
- Bouygues Telecom : 3 992 sites et 7 265 antennes
- Free : 2 099 sites et 7 083 antennes
Bref, sur 3 ans, d'ici 2020, cela implique que les opérateurs auraient prévus d'activer en théorie plus de 10 000 sites 4G (et 20 000 antennes) chacun au rythme actuel. Soit près de 40 000 sites 4G ! Alors, ces 20 000 zones, seront-elles bien en supplément, comme confirmé par Sébastien Soriano, le Président de l'Arcep, devant la Commission des affaires économiques de l'Assemblée Nationale ? Et ces 3 à 4 milliards n'étaient-ils pas déjà prévus de la part des opérateurs ?
Par ailleurs, comme indiqué sur le document de l'Arcep, une exception existe sur les sites du programme « zones blanches centres-bourgs ». Ceux-ci devront être équipés en 4G à 75% d’ici fin 2020 et 100% d’ici fin 2022.
La voix sur WiFi et la 4G mobile à usage fixe en complément
Parmi les autres points abordés par l'accord, sans détails concrets là non plus, il est aussi question pour la couverture à l'intérieur des bâtiments de recourir au WiFi et au FemTo, via notamment la technologie VoWiFi. Orange, SFR et Bouygues Telecom s’engagent à mettre en service en 2018 les services Voix et SMS sur wifi sur leur cœur de réseau, et activer l’option par défaut pour tous les clients ayant un terminal compatible. C'est bien beau tout cela, mais il faudra déjà avoir une connexion internet correcte chez soi, et aussi un smartphone compatible...
Free Mobile s’engage à mettre en service la Voix et les SMS sur wifi d’ici fin 2019, ou de proposer une offre Femtocell apportant un service équivalent.
De même, le sujet de la « 4G fixe », à ne pas confondre avec le THD Radio, est aussi évoquée. Il s'agira pour certaines zones mal couvertes en internet fixe, de compenser par une solution 4G à usage fixe, mais sur les réseaux mobiles actuels. S'il existe déjà des box 4G chez Bouygues Telecom (4G box), SFR et Orange, Free devra donc s'y mettre... ou nous surprendre avec sa Freebox V7 !
La confirmation de toutes ces annonces, et surtout le détail des procédures de déploiements et de calendrier ne seront connus que d'ici quelques mois. En effet, l'Arcep doit ouvrir une consultation publique pour la réattribution des fréquences dont les licences seront prolongées, puis préciser ce processus. Surtout, comme le reconnaissait le gendarme des télécoms, il va falloir mettre en place de vrais outils de mesures et grandement améliorer les cartes de couvertures mobiles actuelles. Celles des opérateurs, mais surtout celle de MonRéseauMobile.
Et un outil comme J'alerte l'Arcep, qui a recueilli en 2 mois plus de 20 000 alertes de problèmes (fixe, mobile, services postaux...), devra lui aussi évoluer et être mieux médiatisé. En intégrant en complément d'autres canaux d'informations, notamment de la donnée apportées par applications comme nPerf, Qosbee...