L’Agence nationale de sécurité sanitaire a publié hier un avis reposant sur quatre années d’enquête et d’auditions sur l’hypersensibilité électromagnétique. Elle y souligne la « grande complexité » de la question, qui confronte les souffrances réelles des personnes affectées et l’absence de « preuve expérimentale solide » permettant de d’établir que les ondes électromagnétiques sont à l’origine de ces troubles. L’agence propose des pistes pour améliorer la prise en charge des personnes se déclarant électro-hypersensibles, mais aussi amplifier les recherches sur le sujet.
Qu’est-ce que l’électro-hypersensibilité ?
L’Anses reprend pour son travail la définition de l’Organisation mondiale de la santé, qui repose sur trois critères :
- la perception par les sujets de symptômes fonctionnels divers non spécifiques (troubles du sommeil, maux de tête, symptômes cutanés, etc.). Les symptômes les plus souvent observés sont la fatigue et les troubles du sommeil.
- l’absence d’évidences clinique et biologique permettant d’expliquer ces symptômes
- l’attribution, par les sujets eux-mêmes, de ces symptômes à une exposition à des champs électromagnétiques, eux-mêmes diversifiés
Un descriptif qui recouvre une large palette de situations, pour lesquelles des critères de diagnostic fiables n’ont pas encore pu être établis. L’Anses souligne ainsi qu’« actuellement, la seule possibilité pour définir l’EHS repose (…) sur l’autodéclaration ».
Exposition aux ondes et EHS : pas de preuve
Concrètement, pour faire valoir les problèmes qu’elles rencontrent, les personnes hyper électro-sensibles ne peuvent donc compter que sur leurs témoignages. Il n’est pas pour autant question de le remettre en cause : « les plaintes (douleurs, souffrance ) formulées par les personnes se déclarant EHS correspondent à une réalité vécue », affirme ainsi l’Anses. Tout comme l'isolement psycho-social, voire les situations d'anxiété et de dépression qui peuvent en découler.
Toute la difficulté est d’appuyer ces signalements par une approche scientifique. Et en l’état des recherches, « aucune preuve expérimentale solide ne permet actuellement d’établir un lien de causalité entre l’exposition aux champs électromagnétiques et les symptômes décrits par les personnes se déclarant EHS », souligne l’agence dans son avis.
Une prise en charge adaptée pour les personnes EHS
Il ne s’agit pas pour autant de baisser les bras face à ces phénomènes que l’on peine aujourd’hui à expliquer. L’Anses liste ainsi un certain nombre de recommandations à destinations des divers parties concernées. D’une part, elle propose plusieurs pistes pour « amplifier l’effort de recherche sur le sujet » : outre la définition de différents axes de recherche, elle suggère aux pouvoirs publics de pérenniser les financements dédiés à la recherche sur cette question et de « soutenir la mise en place d’infrastructures de recherche adaptées ».
Par ailleurs, pour améliorer la prise en charge des personnes électro-hypersensibles, l’agence formule un certain nombre de recommandations, à commencer par « la formation des médecins sur la problématique des effets des radiofréquences sur la santé et mettre à leur disposition des informations leur permettant de répondre aux attentes des personnes se déclarant EHS ».
Créer des espaces « zones blanches » ?
L’Anses réitère au passage certaines recommandations portant sur la réduction des niveaux d’exposition pour l’ensemble de la population :
- « peser avec soin les conséquences d’un éventuel abaissement des niveaux d’exposition induits par les antennes-relais de téléphonie mobile »
- « étudier le lien entre la multiplication du nombre d’antennes et l’augmentation parallèle possible de la valeur moyenne de l’exposition »
Parallèlement, l’Anses se penche sur le cas des zones blanches. Constatant que ces dernières sont « amenées à disparaître » pour répondre aux attentes de la population et aux exigences du régulateur des télécoms (l’Arcep) en matière de couverture mobile, l’Anses retient une « alternative envisageable » : la création de bâtiments ou d’espaces dédiés aux personnes EHS, comme cela a pu être fait en Suisse ou en Suède. « Avant toute nouvelle décision, une évaluation coût-bénéfice des expériences existantes est nécessaire », prévient toutefois l’Agence.