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Le NRA (Noeud de Raccordement d'Abonnés) est un local technique sécurisé dont on entend souvent parler mais qui reste à la fois mystérieux et méconnu. Ariase a eu le privilège de pénétrer au cœur d'un répartiteur (central téléphonique) et vous détaille le fonctionnement du réseau qui relie les abonnés ADSL à leurs opérateurs. Une occasion de mieux comprendre la complexité qui se cache derrière les offres ADSL des fournisseurs d'accès.
Le NRA au coeur du réseau ADSL
Les NRA sont les centraux téléphoniques de l'opérateur historique France Télécom dans lesquels aboutissent les lignes téléphoniques des abonnés, quel que soit leur fournisseur d'accès ADSL. Au 30 septembre 2023, on dénombrait 21485 NRA répartis sur tout le territoire. Autrefois uniquement dédiés au réseau téléphonique commuté (RTC), les NRA (ou centraux téléphoniques) sont aujourd'hui essentiels pour les millions d'internautes encore abonnés à l'ADSL (et pas encore passés en fibre optique).
Le répartiteur est un élément important du NRA puisque c'est ici que va se faire le premier tri entre les lignes des abonnés. Les paires de cuivre sont effet triées pour être ensuite relayées vers les DSLAM respectifs des fournisseurs d'accès correspondant à chaque ligne.
Les technologies xDSL, comme l'ADSL ou le ReADSL, reposent toutes sur l'utilisation de la paire de cuivre utilisée pour le téléphone. C'est sur ce fil de cuivre, qui court de votre prise murale jusqu'aux installations d'Orange, que sont transportés les signaux de voix (téléphonie) et les signaux numériques IP (Internet).
Votre ligne est ainsi reliée de chez vous jusqu'à une armoire de rue, puis à un sous-répartiteur qui regroupe plusieurs lignes d'un même quartier par exemple. Elle repart ensuite jusqu'au répartiteur Orange où sont connectées toutes les paires de cuivre de la zone. Cette portion de réseau est plus communément appelée "boucle locale".
Le DSLAM
Le NRA se compose lui-même de plusieurs parties. On trouve d'un côté le répartiteur Orange, et de l'autre, une salle de dégroupage où sont réunis tous les DSLAM des fournisseurs d'accès alternatifs comme Free, SFR, Bouygues Télécom et OVH Telecom.
Qu'est-ce qu'un DSLAM ? Cette abréviation pour Digital Subscriber Line Access Multiplexer cache en réalité un équipement faisant la liaison entre les lignes des abonnés et le réseau de l'opérateur auquel il appartient (l'opérateur historique ou un opérateur alternatif).
Le DSLAM est donc le premier équipement ADSL géré par un autre opérateur qu'Orange (dans le cas du dégroupage), et sur lequel les opérateurs gèrent le trafic Voix et le trafic Data (données IP). Le DSLAM est également la dernière étape pour la paire de cuivre. Une fois concentrées dans les DSLAM, les données sont réparties par type (voix, internet, tv) puis expédiées sur le réseau de fibre optique du fournisseur pour être acheminées vers ses propres infrastructures.
Exemple de NRA avec un DSLAM outdoor
La salle de dégroupage
La salle de dégroupage est un local réservé aux opérateurs alternatifs dans lequel on retrouve tous les DSLAM de chaque opérateur. C'est ici que les techniciens raccordent vos lignes de cuivre au réseau de fibre optique de votre opérateur. Au coeur de cette salle sécurisée, on retrouve des armoires électriques, des batteries de secours, des jarretières reliant les lignes aux DSLAM, et enfin des câbles de fibre optique qui connectent les DSLAM aux différents réseaux mis en place par SFR, Free, Bouygues Télécom, OVH ou encore les réseaux d'initiative publique.
Les salles de dégroupage sont en général de petite dimension et compte-tenu de la densité des matériels électriques, la température ambiante avoisine les 30°. C'est plutôt dans une ambiance chaleureuse que les techniciens "concurrents" travaillent parfois dans une même salle de dégroupage ! La guerre de l'ADSL et du dégroupage s'arrête donc à l'entrée des salles de dégroupage où chaque équipe s'occupe consciencieusement de ses paires de cuivre respectives.
A noter que France Télécom est légalement obligé de mettre à la disposition des opérateurs une salle de dégroupage par NRA dégroupé. C'est parfois une cause de tension car la taille de certains NRA ne permet pas toujours facilement l'installation d'une salle de dégroupage à proximité. Par ailleurs, toutes les relations entre l'opérateur historique et les FAI alternatifs sont strictement codifiées noir sur blanc sur des contrats dûment vérifiés par l'Autorité de Régulation des Télécoms (ARCEP).
Chaque prestation est contractualisée (et facturée) pour définir clairement les responsabilités de chaque partie. Pour un opérateur alternatif, il faut par exemple envisager un budget annuel supérieur au million d'euros rien que pour les badges d'accès aux salles de dégroupage sur l'ensemble du territoire. On comprend que certains opérateurs, dans ces conditions, se plaignent de problèmes récurrents d'accès aux salles en raison de badges défectueux !
Les accès aux NRA et salles de dégroupage sont strictement réglementés. Les nœuds de raccordement sont bien souvent situées dans les sous-sols de locaux France Télécom ou bien à proximité immédiate. Bref, si après avoir effectué un test d'éligibilité Internet, vous constatez que votre ligne téléphonique est longue de 300 mètres... vous devez certainement habiter à proximité d'un bâtiment France Télécom abritant un central téléphonique !
Le NRA Zone d’ombre (NRA ZO) est une solution technique filaire sur la boucle locale cuivre consistant à créer un nouveau nœud de raccordement d'abonnés (NRA) couvrant intégralement ou partiellement une zone d'ombre. L'objectif du NRA-ZO est donc de rendre éligibles des lignes téléphoniques sur lesquelles l'ADSL n'était pas disponible (affaiblissement supérieur à 78dB).
La solution NRA Zone Ombre est officiellement disponible dans l’offre de référence d’accès à la boucle locale de France Télécom depuis le 11/06/2007. Le NRA-ZO vient ainsi enrichir la gamme de solutions techniques envisageables pour les collectivités locales qui souhaitent réduire la fracture numérique sur leur territoire. Depuis juillet 2011, le NRA-ZO est remplacé par le NRA-MeD (Montée en débit).
Comment fonctionne un NRA-MeD ?
Techniquement, un NRA ZO n'est ni plus ni moins qu'un NRA. Le principe est donc d'installer un DSLAM à proximité immédiate d'un sous-répartiteur (SRA). France Télécom transforme ainsi un équipement à l'origine destiné uniquement à la téléphonie analogique en un "mini central" capable de fournir également l'internet haut débit via l'ADSL.
Concrètement, un multiplexeur ADSL (DSLAM) est relié à une armoire de rue sur laquelle sont connectées les lignes téléphoniques trop éloignées du noeud de raccordement d'origine. En rapprochant le DSLAM du modem des abonnés, l'affaiblissement du signal ADSL est considérablement diminué.
Au final, une ligne située à 6 kilomètres du central téléphonique principal (inéligible avec un affaiblissement de 80 dB) est transférée sur le nouveau NRA-ZO situé à moins de deux kilomètres (souvent moins !). Du coup, son atténuation est divisée par 5 ou par 10 et permet une connexion ADSL performante.
Le NRA-MED : une solution doublement avantageuse
En plus de fournir de l'ADSL aux internautes jusqu'ici inéligibles, l'installation d'un NRA-Zone d'Ombre augmente aussi les débits des autres lignes téléphoniques déjà éligibles. Des connexions "en bout de ligne", jusqu'ici dépendantes de la technologie ReADSL, gagnent en vitesse et ne sont plus limitées à la vitesse de 512 Kb/s.
Une fois que le NRA-ZO est relié au SRA, tous les opérateurs sont en mesure de proposer leurs services aux clients. En clair, les fournisseurs d'accès alternatifs ont la possibilité de proposer leurs offres ADSL en zone non-dégroupées via le DSLAM de France Télécom, ou bien d'installer directement leurs propres équipements. Théoriquement, Free, SFR et Bouygues peuvent donc dégrouper les NRA ZO mais la faible rentabilité de ces zones est visiblement un frein pour les opérateurs alternatifs.
Coût et mise en œuvre du NRA MeD
En tant qu'opérateur historique, France Télécom est le propriétaire de la boucle locale cuivre. Il est donc le seul responsable de la mise en œuvre du réseau téléphonique (et ADSL) entre les prises téléphoniques des abonnés et les nœuds de raccordement. A ce titre, il est également le seul à avoir le droit d'intervenir sur cette partie du réseau. Par conséquent, France Télécom est le partenaire incontournable des collectivités locales qui souhaitent implanter des NRA Zone d'Ombre. La solution NRA ZO n'est pas forcément applicable dans toutes les communes victimes des zones blanches. Des critères strictes de faisabilité sont déterminés par France Télécom. Une zone est éligible à l’offre NRA-ZO si :
- chacun des sous-répartiteurs de cette zone dispose en moyenne de 40 lignes inéligibles à l'ADSL
- aucun sous-répartiteur ne dispose de moins de 10 lignes inéligibles dans les communes rurales (20 lignes dans les autres zones)
Le coût d'un NRA Zone d'Ombre est difficile à évaluer. En effet, nombre de paramètres peuvent influencer l'investissement et faire en sorte que deux NRA ZO implantés dans deux communes différentes ne couteront pas le même tarif. De manière générale, on évoque un coût moyen de 50 et 150 000€ l'unité. Le prix peut monter si des travaux importants de génie civil (tranchées de fourreaux, enfouissement...) sont requis.
De même, le coût varie en fonction de la nature du lien de collecte entre le NRA-ZO et le réseau régional de télécommunications. Si le lien de collecte est en fibre optique, le NRA-ZO est plus cher mais les débits sont meilleurs. A l'inverse, si le réseau est uniquement en cuivre (ou en SDSL EFM - Ethernet on the First Miles), le coût du NRA ZO sera moins élevé.
Débit, TV et dégroupage sur les NRA-ZO
Bien que compactes, les armoires de rue transformées en NRA-Zone d'Ombre sont techniquement des NRA à part entière. Cela signifie que les DSLAM des opérateurs alternatifs sont susceptibles de compléter les DSLAM d'Orange. Tout comme les équipements qui fournissent le service IPTV. Les débits d'un NRA-ZO sont hétérogènes et peuvent varier en fonction des liens de collecte mais également du nombre de lignes connectées sur le DSLAM. En fibre ou bien en SDSL EFM (agrégation de plusieurs paires de cuivre - liens Actelis), les débits peuvent monter en ADSL2+ jusqu'à 20 Mbit/s.
Dans le cadre de la politique de montée en débit sur la sous-boucle locale cuivre, l'offre de gros NRA-ZO de France Télécom a été remplacée par l'offre PRM (Point de raccordement mutualisé). La conséquence est de renommer le NRA-ZO en NRA-MeD (montée en débit) et de systématiquement relier le sous-répartiteur avec de la fibre optique, en prévision de futurs raccordements de la fibre optique jusqu'à l'abonné (FTTH).