Qu'est-ce que le dégroupage ?
La croissance rapide du haut-débit, et de l'ADSL en particulier, met la notion de dégroupage sur le devant de la scène. Techniquement complexe, le dégroupage signifie pour beaucoup d'internautes "Ne plus payer l'abonnement France Telecom".
Cette définition est certes juste mais elle est réductrice par rapport à la réalité. Cette page est l'occasion de préciser la notion de dégroupage et de bien comprendre les enjeux et les différences entre les zones non-dégroupées et les zones dégroupées (totalement ou partiellement).
De manière générale, on définit le dégroupage comme la séparation de la ligne de l'internaute et de l'abonnement au téléphone, pour permettre aux opérateurs ADSL alternatifs (concurrents de France Télécom) de proposer leurs propres services télécoms.
Grâce au dégroupage de la boucle locale en cuivre, les opérateurs alternatifs peuvent relier désormais les foyers en utilisant leurs propres infrastructures de collecte, ce qui induit non seulement une baisse des prix de détail, mais surtout une diversification et un enrichissement des services proposés aux clients, avec notamment l'apparition d'offres ADSL multi-services (Internet, téléphone, télévision et mobile).
Architecture du réseau Internet
Pour bien comprendre le concept de dégroupage, il est nécessaire de connaître plusieurs détails sur la structure du réseau Internet. Voici quelques éléments de réponse sur les différents intermédiaires par lesquels les données numériques transitent pour relier les internautes à la Grande Toile.
- Le Backbone International : c'est l'épine dorsale de l'Internet qui permet de connecter les serveurs de tous les pays entre eux. Ce backbone se compose essentiellement de nombreux câbles sous-marins de fibre optique.
- Point d'échange Internet : baptisée IX (Internet Exchange), c'est une infrastructure de type "datacenter" qui permet aux fournisseurs d'accès d'échanger du trafic Internet grâce à des accords mutuels de "peering". L'interconnexion peut se faire entre opérateurs, mais également avec des CDN (content delivery network) par exemple.
- Point de présence régional : aussi appelés POP (Point of Presence), ces installations sont des points de collecte qui centralisent et agrègent les connexions Internet des clients d'un opérateur pour les remonter vers un PoP national (en général en région parisienne) interconnecté à un point d'échange. Parmi les PoP régionaux d'envergure chez Orange tout comme chez Free et SFR, signalons ceux de Rennes, Nantes, Bordeaux, Toulouse, Marseille, Montpellier, Lyon, Nice, Strasbourg, Dijon et Lille.
- Répartiteur / NRA / central téléphonique : Orange gère plus de 21500 centraux téléphoniques. Aussi appelé noeud de raccordement d'abonnés (NRA), un central peut contenir de 50 à plusieurs dizaines de milliers de lignes téléphoniques. Ces lignes sont branchées sur un répartiteur lui-même connecté à des DSLAM qui gèrent les signaux IP (ADSL) injectés sur le réseau téléphonique.
- Boucle locale cuivre : on appelle aussi boucle locale "le dernier kilomètre". Il s'agit du réseau téléphonique de distribution situé entre le noeud de raccordement (NRA) et la prise téléphonique de l'internaute. C'est un réseau à très forte capillarité car chaque maison de chaque village est reliée à la boucle locale via des sous-répartiteurs (SR) et des points de concentration. La distance entre le central et votre habitation - on parle d'affaiblissement calculé en décibels - est un facteur déterminant pour le calcul de votre éligibilité à l'ADSL et pour déterminer la vitesse de votre connexion.
Dégroupage par un opérateur alternatif
Le secteur du transport de données et de voix représentant plusieurs milliards d'euros, de nouveaux opérateurs téléphoniques sont apparus sur le marché et proposent d'utiliser leur réseau pour plutôt que celui de l'opérateur historique France Telecom.
Les opérateurs téléphoniques alternatifs ont donc construit des réseaux de fibre optique parallèles à celui d'Orange. Leurs réseaux s'étendent depuis le point de peering international jusqu'à des points de présence régionaux (POP) puis jusqu'aux répartiteurs téléphoniques. Le dégroupage signifie donc qu'un équipement DSLAM autre que celui d'Orange est présent dans le central téléphonique dégroupé. Par exemple, le NRA est dégroupé par Free, SFR et/ou Bouygues Telecom.
Tous les répartiteurs ne sont pas et ne seront pas forcément dégroupés. Les opérateurs téléphoniques alternatifs se concentrent sur les plus gros répartiteurs qui sont les plus rentables. Les principales zones urbaines et les villes moyennes sont presque toutes reliées au réseau de un ou plusieurs FAI alternatifs qui proposent leurs offres ADSL en dégroupage total.
Pour dynamiser la concurrencer et accélérer le dégroupage, de nombreuses collectivités locales, comme les départements, investissent dans la création de réseaux d'initiative publique (RIP). Généralement constitués sous la forme de délégation de service public, ces réseaux permettent aux fournisseurs d'accès de commercialiser des offres ADSL en dégroupage en louant l'infrastructure plutôt qu'en installant ses propres équipements.
Le dégroupage total
Bien que les derniers kilomètres de lignes jusqu'au domicile appartiennent toujours à l'opérateur historique, les opérateurs alternatifs comme Free, Bouygues Telecom, OVH ou SFR peuvent louer cette portion de réseau les derniers kilomètres de lignes à Orange et devenir l'interlocuteur unique des internautes dégroupés pour la gestion de leur ligne téléphonique.
Une ligne dégroupée totalement ne supporte plus le signal Voix du réseau commuté d'Orange. Les prises murales sont donc désactivées et les appels téléphoniques transitent alors sous la forme de signaux IP via un modem (une Box) raccordé à un DSLAM dans le central téléphonique.
Le dégroupage a fait ces premières apparitions dans le paysage Télécom français début 2004. Il s'est depuis développé très rapidement. En septembre 2023, 4 millions de lignes raccordées à 17700 centraux ADSL étaient dégroupées en France. Le record de lignes dégroupées a été atteint au cours de l'été 2015 avec 11,7 millions de lignes. Le déclin du dégroupage ADSL est lié à la montée en puissance des offres internet de fibre optique.