Votre forfait mobile vous coûte trop cher ? Pour vous, les appels illimités et 10 Go de données, c’est 20 euros maximum ? Un coup d’œil chez nos voisins va nous permettre de relativiser quelque peu notre vision du juste prix d’un abonnement mobile. Face aux disparités observées, on comprend mieux l’émoi des opérateurs face à l’abolition des frais d'itinérance préparée par Bruxelles. Et l’on s’apercevra que les utilisateurs français sont parmi les mieux lotis en matière de tarification, dans une Europe où la minute d’appel et surtout le giga peuvent encore coûter très cher. Ce qui n’empêche pas de s’interroger sur la pertinence du modèle français...
Forfaits mobiles : les clients français chouchoutés
C’est une étude très détaillée de l’Institut belge des postes et télécommunications (IBPT) qui nous l’apprend : comparé à ses homologues européens, le client français n’a pas vraiment à se plaindre du prix de son forfait. Centré sur les pays voisins de la Belgique – Pays-Bas, Allemagne, Luxembourg, France, Royaume-Uni – ce travail met en évidence la position très privilégiée de ces deux derniers marchés (sur la base des tarifs d’août 2015). Le consommateur français bénéficie notamment des tarifs les plus avantageux sur 4 des 6 profils élaborés pour les besoins de l’étude (et n’est pas distancé de beaucoup sur les 2 autres).
Les opérateurs tricolores se distinguent en particulier sur le tarif des petits forfaits, type RED 3h ou Sosh 2h, moitié moins chers que ceux des britanniques, et 4 à 5 fois meilleur marché qu’en Allemagne ! Mais la France se révèle aussi le pays le moins cher pour le profil le plus élevé (intensif en appels et données), avec un coût moyen de 20€, contre 50€ en Allemagne. Et encore le plafond retenu par l’étude de l’IBPT pour la consommation de données s’élevait-il à 2 Go. Soit peu ou prou le niveau moyen consommé par l’utilisateur français actuellement, selon les derniers chiffres de l’Arcep.
Données mobiles 4G : la France bien placée
Au regard des usages actuels, mais aussi des offres proposées par les opérateurs français, cette enveloppe de 2 Go reste relativement modeste, et sera sans doute bientôt obsolète. Comment notre pays se positionne-t-il sur les gros volumes de data – 10, 20, 50 Go – qui seront sans doute la norme de demain ? Encore une fois parmi les moins chers ! C’est ce qui ressort de l’observatoire semestriel Digital Fuel Monitor, publié ce mois-ci par le consultant spécialisé finlandais Rewheel. Sur la période en cours, la France s’affiche ainsi dans le top 5 des pays où le forfait 20 Go est le moins cher (18,99€, chez La Poste Mobile). Et évolue juste derrière le peloton de tête des pays où 30€ débloquent le plus de gigas sur un smartphone : pays scandinaves, pays baltes, Pologne et Irlande, avec souvent, pour ce prix maximum, de la data illimitée en 4G, comme en témoigne l'infographie suivante.
L’effet quatrième opérateur
La bonne position tricolore est évidemment imputable à Free et ses 50 Go pour 19,99€, qui sont venus bousculer le paysage commercial en 2012, et ont tiré tous les prix à la baisse. Dans une précédente étude, Rewheel soulignait ainsi le rôle crucial, en France ou encore au Royaume-Uni, de l’apparition d’un quatrième opérateur. Un aiguillon susceptible de dégonfler les prix, comparé à d’autres pays comme l’Allemagne ou l’Espagne, des marché « protégés » où sévissent des tarifications beaucoup plus lourdes. De fait, dans le classement par opérateur, SFR et Bouygues sont également bien positionnés sous le seuil des 30€, avec par exemple le B&You 20 Go à 24,99€ ou le Power 20 Go à 25,99€. A titre de comparaison, l'opérateur allemand T-Mobile propose actuellement ses 20 Go en 4G à... 79,95€/mois !
La Finlande, championne de l’Internet mobile
Mais les prix bas ne sont pas une fin en soi : encore faut-il qu’ils correspondent à une réalité d’utilisation. Toujours grâce au Digital Fuel Monitor, on observe qu’en terme de consommation réelle de données mobiles 4G (0,70 Go/mois et par personne en 2015), la France rétrograde au même niveau que l’Italie et l’Espagne, où le giga est pourtant bien plus cher...
En haut de ce tableau, on retrouve toujours les pays baltes et scandinaves, Finlande en tête avec près de 10 Go en moyenne l’an dernier et même 14 Go de data mobile par mois et par habitant au premier semestre 2016. A comparer avec les 11 Go par mois par habitant consommés en Allemagne... sur l’Internet fixe. Une performance que les consultants de Rewheel imputent à l’efficacité des opérateurs finlandais en matière de « fructification » du spectre du réseau au bénéfice des utilisateurs, matérialisé dans le graphique ci-dessous. Le tout tiendrait notamment au modèle commercial choisi : de l’illimité sur les données, ce qui permet notamment d'utiliser la connexion 4G en mode hotspot wi-fi sans aucune restriction. La segmentation du marché se fait en revanche sur le débit disponible (3G, 4G et plus).
Un modèle, donc, où l’on paie plus pour aller plus vite. Serait-il transposable en France ? Difficile à imaginer dans le contexte actuel de bataille pour les parts de marché, où les prix bas restent déterminants pour séduire le consommateur. Sans compter les spécificités finlandaises (forte concentration urbaine et usage répandu de la 4G mobile comme seul mode d’accès à l’Internet fixe). Rewheel défend en tout cas la compétitivité accrue de ce fonctionnement, qui permet, selon ses experts, d’asseoir la santé financière des opérateurs tout en satisfaisant les consommateurs. Vu de l’Hexagone, l’argument peut faire mouche quand on pense au manque chronique de rentabilité d'un Bouygues ou d'un SFR, qui pèse mécaniquement sur leur capacité d'investissement dans la modernisation des réseaux...